dimanche 22 mai 2016

Remise tardive de CDD : La Cour de Cassation confirme sa jurisprudence en l'étendant au TESE et au TESA

Extrait de cfdt.fr
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La transmission tardive au salarié, dans le cadre de l’utilisation du titre emploi service, de la copie du volet d’identification entraîne la requalification de la relation de travail en CDI. C’est ce que vient énoncer la chambre sociale de la Cour de cassation dans un arrêt récent du 3 mai 2016. Cass. soc., 3 mai 2016 n°14-29.317, publié.   
  • Qu’est-ce que le titre emploi service entreprise ?
Créé en 2008 et élargi en 2015, le titre emploi service entreprise (TESE) est un dispositif visant à simplifier les formalités sociales liées à l'emploi de salariés et à faire gagner du temps aux employeurs dans la gestion administrative de leur personnel
Ce titre emploi service entreprise permet aux entreprises de moins de 20 salariés et aux groupements d'employeurs de pouvoir gérer plus facilement l'ensemble de leurs salariés, cela quel que soit leur contrat de travail (CDI, CDD, contrat d'apprentissage...).
Il est à noter que sont exclues de ce dispositif, les entreprises situées dans les Dom-Tom ou relevant du régime agricole ou de régimes spéciaux (EDF, GDF, les mines...), mais aussi les entreprises de travail temporaire et les groupements d'employeurs.
Les employeurs souhaitant utiliser le titre emploi service entreprise doivent veiller à remplir un certain nombre de documents à savoir :
-           un  formulaire pour accomplir les formalités liées à l'embauche  (déclaration préalable à l'embauche et contrat de travail) ;
-           une  déclaration pour les organismes de protection sociale gérant des régimes collectifs et obligatoires : Urssaf, assurance chômage, caisses de retraite complémentaire et supplémentaire, organismes de prévoyance, caisse de congés payés pour le secteur du bâtiment et des travaux publics (BTP) ou caisse interprofessionnelle de congés-payés, notamment pour les secteurs transport, manutention, nettoyage industrie ;
-           un règlement pour les cotisations de protection sociale obligatoire dues à ces organismes.
Dans un arrêt du 3 mai 2016, les Hauts magistrats viennent préciser les sanctions en cas de non-respect des modalités d’utilisation du titre emploi service entreprise.
  • Les faits, la procédure et la problématique
Dans cette affaire, un salarié a été engagé en tant que maître d’hôtel en CDD. Après plusieurs CDD éffectués, ce dernier a décidé d’agir en justice afin d’obtenir la requalification de ses contrats en CDI. Le salarié fait grief à l’employeur, qui a utilisé le titre emploi service pour accomplir les formalités sociales relatives à son contrat de travail, de lui avoir transmis tardivement le volet d’identification.
Saisie de la demande du salarié, la cour d’appel rejette sa demande.  La juridiction de second degré retient que le régime du titre emploi service entreprise, dérogatoire du droit commun des CDD, n’impose à l’employeur que de remettre au salarié le volet qui lui est destiné, sans que le texte n’impose de délai précis ni la signature effective de ce volet.
Les juges d’appel estiment enfin que le fait que le salarié n’aurait pas, ou aurait signé tardivement certains de ces volets et sans incidence sur la validité du contrat et ne peut à lui seul entraîner une requalification en CDI.  
S'estimant lésé, le salarié a formé un pourvoi en cassation.
La question tranchée par les juges est la suivante : la transmition tardive du volet d'identification conduit-elle à la requalification du contrat en CDI ? 
  • La transmission tardive du volet d’identification conduit à la requalification du CDD en CDI
Les magistrats du Quai de l’Horloge censurent l’analyse de la cour d’appel en estimant que l’employeur doit, suivant l’article D1273-3 du Code du travail, adresser au centre national de traitement compétent le volet d’identification du salarié au plus tard le dernier jour ouvrable précédant l’embauche. La chambre sociale de la Cour de cassation ajoute également que L’article D1273-4 du Code du travail, prévoit qu’une copie de ce volet est transmise sans délais au salarié. Enfin, la Cour de cassation énonce que la transmission tardive de ce volet équivaut à une absence d’écrit, qui entraîne la requalification de la relation de travail en contrat à durée déterminée.
Autrement dit, la Cour de cassation pose le principe suivant : en matière de titre emploi service entreprise, la transmission tardive du volet d’identification au salarié peut entraîner la requalification du CDD en CDI.
En matière de CDD,  l’employeur est tenu  de transmettre au salarié son contrat de travail dans les deux jours qui suivent l'embauche (article L122-3-1 du Code du travail) sous peine de requalification. En effet, qu’il s’agisse de l’absence pure et simple de transmission, de la remise hors délai du contrat ou de l’incapacité pour l'employeur de prouver la transmission du CDD au salarié, la sanction est la requalification du CDD en CDI.
La chambre sociale de la Cour de cassation semble donc reprendre ici son ancienne décision selon laquelle la transmission tardive du CDD au salarié équivaut à une absence d’écrit entraînant la requalification en CDI (1) et l’applique au titre emploi service entreprise.
Certes l’employeur est tenu de remettre au salarié le volet d’identification sous peine de sanction, mais quand doit-il s’acquitter de cette obligation ?
Selon l’article D1273-4 du Code du travail, c’est « sans délai » que le volet identification est transmis au salarié. Autrement dit, l’employeur doit  remettre ce volet au salarié soit concomitamment à la prise de poste du salarié, soit avant son embauche.  
La décision de la Cour de cassation s’inscrit dans le sens d’une meilleure protection des salariés et n’est pas sans rappeler une ancienne décision de la Haute cour. En effet, dans un arrêt de mars 2013 (2) relative au titre emploi simplifié agricole, la chambre sociale avait déjà  sanctionné la remise tardive au salarié de la partie du titre correspondant au contrat de travail par la requalification en CDI.
 (1) Cass. Soc. 17 juin 2005, N°03-42.596.
(2) Cass. Soc. 13 mars 2013, n°11-28.687 PB.

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