lundi 28 janvier 2013

Nouvelles protections des salariés en matière de faute inexcusable : la responsabilité des groupements d'employeurs n'est toujours pas écartée.


Il faut savoir que lorsqu’un accident du travail ou une maladie professionnelle est imputable à une faute inexcusable de l’employeur, la victime, si elle est atteinte d’une incapacité permanente, a droit à une majoration de la rente ou du capital et, quoi qu’il en soit, à l’indemnisation de l’ensemble des préjudices qui ne sont pas réparés par la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles.
Les sommes correspondantes lui sont versées par la caisse, qui se retourne ensuite contre l’employeur.
Cette indemnisation exprimée en moyenne nationale tourne autour de 75 000 € par procédure.
Dans plus de la moitié des cas (56 %) cependant, ces sommes ne peuvent être effectivement récupérées.
Pour un quart d’entre elles, c’est en raison de la disparition ou de l’insolvabilité de l’employeur, qui pose des difficultés spécifiques dans la mesure où la majoration de rente ou de capital est recouvrée par une cotisation complémentaire sur des périodes qui peuvent aller jusqu’à 20 ans.
Lla Loi de finances de la sécurité sociale propose donc que ces sommes soient désormais recouvrées sous forme de Capital.
Mais la majorité des sommes non recouvrées (près de 20 M€) sont afférentes aux sinistres dans lesquels l’employeur se prévaut de l’inopposabilité à son encontre de la décision de reconnaissance par la caisse d’assurance maladie du caractère professionnel du sinistre. En effet, la reconnaissance de la faute inexcusable par le juge, alors même qu’elle est nécessairement précédée de la reconnaissance, dans le cadre de l’instance en reconnaissance de faute inexcusable à laquelle l’employeur est partie, du caractère professionnel du sinistre, n’empêche pas l’employeur de faire échec à la récupération des indemnités que la caisse a versées à la victime ou à ses ayants droit, s’il n’a pas été mis en capacité de présenter ses éventuelles observations lorsque la caisse a reconnu le caractère professionnel du sinistre.
L’irrégularité commise dans la phase administrative par la caisse produit ainsi des effets excessifs, alors que l’employeur dispose de la possibilité de contester le caractère professionnel du sinistre dans le cadre de l’instance introduite par le salarié en vue de voir reconnaître une faute inexcusable.
L’article 66 vise à remédier à cette situation, en distinguant les procédures et en prévoyant que, quelles que soient les conditions d’information de l’employeur par la caisse au cours de la procédure d’admission de l’origine professionnelle de l’accident ou de la maladie, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur par une décision de justice passée en force de chose jugée emporte l’obligation pour celui-ci de s’acquitter des sommes dont il est redevable à ce titre.

Pour rappel, la reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur dans la survenance d’un accident du travail (ou d'une maladie professionnelle) permet à la victime d’obtenir : 

- une majoration de la rente d’incapacité permanente qui lui est allouée ; 


- exclusivement devant les juridictions de sécurité sociale, la réparation intégrale des préjudices subis et non réparés par la majoration, selon les règles de responsabilité civile de droit commun. 


Ces sommes dévolues sont versées directement à la victime par la caisse d’assurance-maladie qui en récupère le montant auprès de l’employeur : 


- la majoration de la rente par le biais d’une cotisation complémentaire ; 


- la réparation des divers préjudices subis par le biais d’une action judiciaire. 


Pour faciliter la récupération par les caisses des sommes dont elles ont fait l’avance, la loi prévoit : 


- à compter du 1er avril 2013, la récupération des majorations de rentes payées par la caisse via 
l’inscription au compte AT de l’employeur d’un capital représentatif des sommes dues. L’entreprise se verra donc imputer immédiatement sur son compte AT le coût de sa faute inexcusable et cela entraînera une très forte augmentation des ses cotisations AT dès lors qu'il fait l'objet d'une tarification mixte (plus de 20 salariés) ou individualisée (plus de 149 salariés); 


- l’impossibilité pour l’employeur de remettre en cause la décision de justice reconnaissant sa faute inexcusable: cette décision une fois passée en force de chose jugée emportera obligation du versement des sommes dont il est redevable. Cette mesure sera applicable aux actions introduites devant les tribunaux à compter du 1er janvier 2013.



Or, il  convient de rappeler  que même si le code du travail désigne expressément l'adhérent comme seul responsable en matière d'hygiène, sécurité et conditions de travail, les choses se compliquent dès lors qu'il s'agit d'indemniser l'accident du travail dans le cadre d'une faute inexcusable de l'employeur.


En effet, le groupement d'employeurs qui est juridiquement l'employeur de la victime, reste tenu des conséquences financières de la faute inexcusable de l'adhérent.

Actuellement il n'existe aucune jurisprudence propre aux groupements d'employeurs sur cette question de l'indemnisation du salarié.
Mais il existe plusieurs jurisprudences qui concernent l'intérim dont les attendus sont suffisamment généraux pour que la solution retenue par les magistrats de la Cour de Cassation soit facilement transposable au cas des groupements d'employeurs. Tel est le cas de l'arrêt rendu par la Cour de Cassation le 6 juillet 2000 (RJS 2-10/2000 n°1004).

Quand bien même le groupement était condamné il pouvait jusqu'à présent se retourner vers l'adhérent auteur de la faute pour se faire rembourser les sommes versées à la victime.

L'arrêt rendu par la chambre civile de la Cour de Cassation du 17 décembre 2009 (Bull 2009, II, n°293) a changé la donne.
Le coût de l'accident du travail mis intégralement à la charge d'une entreprise utilisatrice en application de l'article L. 241-5-1 du code de la sécurité sociale, lorsque l'accident est entièrement imputable à la faute inexcusable de cette entreprise, doit s'entendre, en vertu de l'article R. 242-6-1 du même code, du seul capital représentatif de la rente d'accident du travail.

Il convient donc que les groupements d'employeurs consultent rapidement leurs assureurs pour vérifier qu'ils sont bien couverts pour les autres indemnisations qui restent désormais à leur charge.

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